Réflexions sur la métaphysique, Dieu, la spiritualité, les religions, la science, la société et la politique
9 Novembre 2014
Un appel dans la nuit
Qui est celui qui sait ?
La Science témoigne de Dieu
Dieu cause première
Je suis Lui
Pourquoi l'appeler Dieu ?
Casablanca, 1950, j'habite avec mon père une petite maison à quelques centaines de mètres d'un bidonville. Au milieu du bidonville un mini-minaret édifié avec les mêmes matériaux disparates que les baraques alentour.
Le matin, alors que la nuit finissante enveloppe encore le quartier de silence, l'appel du muezzin s'élève. Sa voix, lointaine, portée à la force des poumons, m'appelle moi aussi. Je suis athée mais je suis remué par la voix de l'homme présent là-bas dans l'ombre qui appelle à se tourner avec lui vers Dieu. Soixante-quatre ans ont passé et la voix de cet homme résonne encore en moi. Je ne me suis pas converti à l'Islam mais cet appel a été un des tous premiers qui, pas à pas, m'a amené à l'évidence de Dieu.
Cela, par quoi il y a quelque chose plutôt que rien, Cela, hors de l'espace et du temps, Cela existe, il n'y a que Cela qui existe. Nous qui sommes nés et qui allons mourir, nous qui ne sommes pas aujourd'hui ce que nous étions hier, nous n'existons pas vraiment. Et pourtant nous savons que Cela existe, nous savons que nous n'existons pas vraiment. Mais alors qui, en nous, est celui qui sait ?
Le simple fait que la science soit possible suffit à témoigner de Dieu. La nature n'est pas un chaos, elle se prête à l'investigation scientifique. Les mathématiques, pur fruit de l'esprit de l'homme, nous permettent de décrire la logique de la nature. La convergence entre la nature intelligible et l'esprit de l'homme tout cela témoigne d'un Esprit qui est la matrice de tout.
Première cause : ce serait une pichenette initiale à partir de laquelle les causes ne cesseraient de s'enchaîner inexorablement. Cause première : c'est la cause qu'il y a des causes. C'est aussi la cause qu'il n'y a pas que des causes. Il y a aussi le hasard. Hasard essentiel : pas seulement le résultat de la connaissance limitée que nous pouvons avoir de toutes les causes, nous petits humains, mais hasard sui generis (de son genre). Le hasard témoigne de la liberté de Dieu comme il assure notre liberté.
C'est ce que proclame la philosophie védantique : « So aham asmi / Lui moi je suis ». C'est aussi ce qu'implique Jésus quand il dit : « avant qu'Abraham fût Je suis » (Jean 8-58) ou encore : « vous êtes des dieux » (Jean 10-34). Une hymne hindoue va même jusqu'à répéter ce refrain : « oh moi, hommage à moi » ! Il ne s'agit évidemment pas de confondre sa petite personne avec Dieu mais au contraire de se concentrer sur ce qui reste derrière la conscience « Je suis » quand on en a écarté tout attribut. La conscience à l'état pur c'est Dieu.
Mais notre conscience d'êtres humains incarnés n'est jamais la conscience à l'état pur. Si nous pouvions purifier notre conscience de tout attachement la vie de notre corps ne serait plus soutenue, elle s'éteindrait. « Je suis Lui » ne peut être vécu comme réalité accomplie mais comme abandon de soi à Dieu : pour paraphraser l'apôtre Paul, ce n'est plus moi qui vit, c'est Lui qui vit en moi. Avec un bémol tout de même : le moi continue à vivre mais avec une fluidité qui le rend progressivement plus perméable aux sollicitations de Dieu.
« Cela », « Lui ». Alors pourquoi « Dieu » ? La question se pose car dans la plupart des religions Dieu désigne bien plus qu'un lointain Être suprême. C'est aussi un personnage qui intervient dans la vie des hommes en dictant un Livre ou des Lois, qui manifeste des sentiments humains comme la colère ou la miséricorde. À tel point qu'on peut penser que les hommes ont tendance à ramener Dieu à leur échelle et même à l'instrumentaliser. Dieu devient en quelque sorte le garant de l'ordre social établi. Des lois cruelles lui sont même attribuées. On ne voue plus un culte à une idole de bois, de pierre ou de bronze mais à une idole immatérielle nourrie du sang des hommes.
Mais, au delà de l'abus qui en a été fait, « Dieu » a représenté la proximité de l'Être Suprême. Dieu est là, en filigrane, dans la nature, dans l'être humain. Il peut même embraser notre cœur. Certes, il y a le mal qui fait vaciller notre perception de Dieu mais contre le mal il y a encore Dieu. Même si le mal semble l'emporter, Dieu est notre ultime refuge : « Père, entre tes mains je remets mon esprit ».
À suivre...